
Il s'agit d'une copie (datant de 1765), de la lettre de partage (1347) de la succession de Jeanne de Montbéliard, veuve du comte Ulrich III de Ferrette, pour leur fille aînée Jeanne de Ferrette.
Voici un rappel généalogique des comtes et comtesses de Montbéliard au début du XIVe siècle (en couleur, héritières du comté de Belfort en totalité ou en partie) :

La succession de Montbéliard est très complexe (voir notre article). Les comtés / seigneuries de Montbéliard - Belfort échoient en 1282 (14) à Guillemette de Neuchâtel (de la famille de Neuchâtel en Suisse).
Son mari est Renaud de Chalon, dit de Bourgogne. Il accordera à la ville de Belfort ses franchises en 1307.
Le couple a un fils et 4 filles. Le premier, Othenin, n'est pas mentalement en mesure d'assumer la succession. Les terres de Montbéliard et Belfort sont respectivement attribuées à Agnès et Jeanne de Montbéliard.
Cette dernière épouse Ulrich III, comte de Ferrette (Ulrich zu Pfirt 15), dont les possessions (par exemple la seigneurie de Rougemont) sont voisines des terres Belfortaines de Jeanne.
Ulrich de Ferrette décède le 11 mars 1324. Ses fiefs sont théoriquement destinés par moitié à chacune de ses deux filles, Jeanne et Ursule.
Mais, le 17 mars 1324 ont lieu deux événements majeurs qui décideront du futur de la région : Jeanne de Ferrette épouse Albert de Habsbourg et, le même jour, des accords sont signés entre Albert et sa belle-mère permettant au premier d'entrer en possession de l'intégralité des fiefs de Ferrette, contre compensations financières à Ursule et son futur mari (10).
Jeanne de Montbéliard, quant à elle, se remarie rapidement avec le margrave Rudolf Hesso de Bade ; ils ont également deux filles, Marguerite et Adélaïde.
En 1347, deux ans avant son décès, Jeanne de Montbéliard décide de diviser ses biens entre ses quatre filles.
La pièce dont nous parlons ici est la copie d'une des lettres de ce partage.
Poursuivant nos recherches, nous avons pu découvrir d'autres documents relatifs à cette succession, dans divers dépôts d'archives, ou transcrits par d'anciens historiens des grandes familles du Saint-Empire.
Un accord de partage a été conclu, d'une manière s'apparentant au seing privé, entre les héritières de Jeanne de Montbéliard : quatre personnages éminents ont été désignés pour le préparer ; ils ont formé quatre lots, puis chacune des filles a tiré au sort son lot.
Enfin, des lettres de partage ont été rédigées, toutes sur le même modèle :
- une introduction commune,
- une partie de longueur variable décrivant les biens et fiefs revenant à l'intéressée,
- une partie finale commune précisant les biens laissés en indivis et les conditions de leur utilisation.
Chacune de ces lettres a été remise à l'intéressée et conservée par ses descendants (12). Dans le cas présent il s'agit donc de Jeanne de Ferrette, de la maison de Habsbourg, puis de la chancellerie et des archives impériales, et enfin des archives de l'État autrichien à Vienne.
Nous avons eu la satisfaction de découvrir sur le site de cette deernière institution la reproduction numérique de cette pièce, sous la cote AT-OeStA/HHStA UR FUK 135.
Elle a par ailleurs été transcrite et commentée en latin par un historien allemand du XVIIIe siècle : Anton Steyerer (1).
La pièce AD90 3E 103 est une copie de cette lettre. Elle ne nous a pas été inutile : elle est plus lisible (ci-dessous à gauche) que l'original (à droite).
En voici les passages principaux (transcriptions en italiques), ainsi que la traduction de Karin Scharrer.

Wir Johanne von Gotz gnaden Herzogin ze Osterrich,ze Styr, und ze Kernden, darzu Grevin ze Phirt, in
unserme, und unsers lieben bruderlins, Herzog Albrech-
tes und herren derselben lender, namen, des wir
vollen gewalt und macht hettent, mit sinem offenen
briefe, Ursule von Phirt, Grevin ze Hohemberg, Grede
und Adelheit, Margrefin und Vrowen ze Baden, tunt
kunt allen den die disen brief ansehent oder hörent
lesen, das wir mit willen und gunst unsern lieben
mannen, und och unsrer lieben vrowen und muter,
Vrowen Johannen von Montbliger Grevin ze Ka-
zenellenbogen einellekliche ubereinkomen sint, das
wir daruber gesetzet hant die erbere, und wise
manne, her Heinrichen von Grandwiler, her Peter
den Schaler von Basel her Herman von Roppach
Rittere, und Heiczelin von Morsberg einen edel knecht,
das die bi dem eide, den si darumbe ze den heiligen
gesworen hant, mit gestabeten worten, unser vor-
genanten vrowen und mutter vestin, burge statte,
lande und lutte, die gulte und das darzu gehört das
si von vatter und von muter geerbet hat, (...)
Nous avons institué messire Heinrich von GrandwilerHenri de Grandvillars, messire Peter der SchalerPierre le Schaler, littéralement "l'éplucheur", chevalier et bourgmestre de Bâle. Il s'agit probablement de Peter III, marié à une certaine Nesa von Rotpach, qui pourrait appartenir à la famille de Roppe / Roppach / Rotbach de Bâle, messires Hermann von Roppachde Roppe, chevalier, et Heiczelin von MorsbergHeinzelin (diminutif de Heinrich ?) de Morimont, écuyer, par le serment qu'ils ont prêté en termes propres, à l'effet de partager en quatre les biens de notre mère, forteresses, châteaux, villes, terres et habitants, les cens et tout ce qui en dépend, et tout ce qu'elle avait hérité de son père et de sa mère (...)
Fin de la partie commune. Suit la description de la part de Johanne / Jeanne :


Rosenvels die burg mit den gutern die sie nach ge-
schriben stant ze unserme teil, das ist zewissende das
Meigertom vom Tal Semermeigin, Chaux, Capellen,
Sode, Gyrameigin, Wissemont Rogegotte und Grumeigin
Item von den meigertom von weites, Oyes, löbe, for-
seloneschert, und weites, Item von den meigertom von
Bamlier, Urserey, Argesans und Bamvler, Item ein
funder wisses wingeltz an dem breittelinge ze Ufholtz,
Item einhalp fuder wisses wingeltz stat ze phant für
zwentzig phunt neuwer pheningen ze Ufholtz, Item das
gebirge mittenander, Lambers buchholtz das buchholtz
von Chaux, die wener vor Chaux, das buchholtz von
der rarriere, die nider schame von der Löbe und Sa-
lebert der walt, Item die Lehen die sie nach geschriben
stant, das ist zewissende Aucelle, Merswiler Miserach,
der herre von Montmertin, her Johannes ulrich vom
Hus, daz Lehen von Dale der herre von Hasemburg,
der Schaler von Basel, daz lehen von Mistorf, daz
lehen von Röschlis, Turing von Rammstein, daz
lehen von Biederstan, kraft von Basel, Item sint

wissende her Jacob von Bamuler der Ehenret von Bamu-
ler, und cortestelle von Bamulers kint, Item belibet
den rier teilen gemein, beueges und die vroderunge
die unseer egenante muter an Pirrin von Vy hat, (...)
la mairie du Val [de Chaux, de Rosemont] : Sermamagny, Chaux, Lachapelle, Lepuix, Giromagny, Vescemont, Rougegoutte et Grosmagny,
la mairie d'Évette : Oye, Éloie, Forchelon-Essert et Évette (4),
la mairie de Bavilliers : Urserey, Argiésans et Bavilliers,
un foudre de vin blanc au Breittelinge à Uffholtz,
un demi-foudre de vin blanc d'une valeur de 20 livres de nouveaux pfennigs à Uffholtz,
la montagne mittenandernous laissons en italiques les toponymes indéterminées le buchholtzhêtraie ? de Lamber, le buchholtzhêtraie ? de Chaux, les wenerou Weüer (Steyerer) devant Chaux, le buchholtz des varriere, la schameSchame: peut-être "passerelle" ? inférieure d'Éloie et le bois du Salbert.
En outre, les fiefs suivants : Auxelles, Morvillars, Méziré, celui des seigneurs de Montmertin, de Johannes Ulrich vom Hus, le fief de DaleDasle (?), le fief des seigneurs de Hasembourg, de Schaler de Bâle, le fief de Mistorf, le fief de Röschlis, de Turing de Rammestein, le fief de Biedertan et (de ?) Kraft de Bâle.
Sont en outre partagés, gegen den vogetie von den Probestiecontre le bailliage de la prévôté ? le sens n'est pas clair, ce qui concerne les sieurs Jacob de Banvillars (2), Chenret de Banvillars et l'enfant de Cortestelle de Banvillars, ainsi que les créances existantes de notre mère sur messire Pirrin von Vy.
On le voit, plusieurs fiefs, droits ou vassaux sont peu identifiables.
La partie suivante est, peu ou prou, commune aux trois lettres de partage :
Chacun peut utiliser les prés, les pâturages dans les forêts et les champs comme auparavant. Les servitudes restent également inchangées.
Nous avons décidé que personne ne ferait de malhonnêteté avec sa part des biens et que tout resterait comme avant, qu'on pourrait moudre, cuire [sic], utiliser les champs comme avant. De même, personne ne doit cultiver son champ de manière à nuire à son voisin.
En outre, il a été décidé que, tant que notre chère dame et mère serait en vie, ses biens seraient utilisés selon sa volonté, comme jusqu'à présent, sans aucune contradiction, et que nous l'assisterions fidèlement, au mieux de nos connaissances et de nos capacités.

genante herczogin, Ursule von Phirt, graf Hug von
Hohemberg ir eilicher man, Grede Margrefin ze Ba-
den, margraf Friderich ir eilicher man, Adelheit
margrefin ze Baden und Rudolf quant weker ir
eilicher man, vergehent und erkennent offenliche das (...)
Nous, la duchesse susmentionnée, Ursule de Phirt et son époux le comte Hugo de Hohemberg, Grede, margravine de Baden et son époux le margrave Friderich, Adelheit margravine de Baden et son époux Rudolf dit le Weker, confessons et reconnaissons publiquement que
le partage effectué l'a été avec notre bonne volonté, à notre connaissance et sur notre ordre. Nous confessons que, par notre fidélité, nous avons juré par serment de toujours garder et respecter tous les points écrits dans cette lettre, sans malice ni tromperie. C'est pourquoi nous avons apposé notre sceau sur cette lettre et demandé à notre chère maîtresse et mère de faire de même.
Afin que les faits décrits restent à jamais inchangés, nous, les quatre sœurs, avons juré sous serment et demandé que l'éminent sire Thiebalt d'Underswiler, prêtre, notaire public et scribe assermenté du Saint-Empire, écrive dans cette lettre les faits décrits - qui ne peuvent être contestés ni secrètement ni publiquement - et qu'il la signe de son seing habituel.
Donné à Altkirch le 26e jour d'août de l'an 1347 après la naissance de Dieu.
Le document se termine par le subscriptio en latin de la main dudit Thiebalt d'UnderswilerUndervelier (JU) :


Et moi Theobald de Underswilre, prêtre du diocèse de Bâle, notaire public juré par autorité Impériale, puisque j'ai personnellement assisté à tous les actes ci-dessus sans exception au moment où ils se passaient, comme il est rapporté ci-avant, les an, jour et mois que dessus, indiction XV, en la sixième année du Pontificat de notre Très Saint Père dans le Christ, notre vénéré ClémentClément VI, pape par la providence de Dieu, au lieu ci-dessus désigné peu avant les vêpres, en présence de discrètes personnes messires Jean, dit Hannower, maréchal de madame la susdite duchesse, Pierre dit Schaller, de Bâle, Henmann de Roppe, chevaliers, et de messire Hugues de Ronenach, chanoine, prêtre de l'église de Belfort, témoins appelés et convoqués aux susdits actes, et puisque, avec les susdits témoins, j'ai vu et entendu faire absolument tous les actes ci-dessus, j'ai écrit de ma propre main le présent document, sur la demande et la réquisition instante des deux sœurs susnommées, je l'ai rédigé pour lui donner cette forme officielle, et je l'ai signé de mon seing habituel, sur leur demande.Les quatre sceaux pendants (il en manque probablement un à gauche) sont malheureusement peu identifiables sur l'image en ligne, hormis le dernier (ci-dessous à gauche) qui est le sceau de la comtesse Jeanne de Montbéliard :


Ci contre, à droite, le sceau de Jeanne de Montbéliard dans un document de 1349. ''Dans un champ treillisé, la comtesse monte en amazone un destrier, un oiseau de proie sur le poing droit, deux écus dans le champ".
public domain, via Wikimedia Commons, see page for author,
Pas de copie conservée à Belfort pour les autres filles de Jeanne de Montbéliard.
Au début du XVIIIe siècle en revanche, l'original (ou une copie) était, comme dans le cas précédent, conservé aux archives archiducales d'Innsbruck (archivo Archiducali Oenipontano), comme le prouve la transcription d'Herrgott (3). En toute logique, cette pièce aurait dû avoir le même destin que la précédente, et être détenue actuellement par les archives de l'État autrichien. Ce n'est apparemment pas le cas.
Nous utiliserons donc ici la transcription d'Hergott, en nous limitant à la partie centrale, qui décrit les fiefs échus à Ursule lors du tirage au sort de 1347.
Cette partie est beaucoup plus longue et complexe que pour Jeanne. En reprenant Bardy (5), "le château de Belfort presque tout entier, les deux bourgs et la partie haute de la ville passent aux mains d'Ursule, tandis que la partie basse entre dans la part de" sa demi-soeur puinée Adelheit. Ce document est "extrêmement curieux par les détails topographiques assez circonstanciés" qu'il fournit.

Ensuite, la ligne de démarcation se dirige, du côté de la salle vers la ville basse et des remparts du bas, de la maison dudit Griesemberg vers la porte entre la vieille et la nouvelle ville, en dessous de la porte. Item, en passant par la maison de Simangen jusqu'à la maison de Richard Lembelin ; et depuis cet endroit, en direction de la cave.
De là, elle descend entre les maisons de Hermann de Roppe et de Johann Pirresche. Puis, en passant devant la maison du fils de Hugenat Maltptis, la démarcation continue à descendre par la ruelle entre la maison de Kinnge de Bennlier et la grange dudit Hugenat Maltptis, et devant la maison de Guillaume Aignelles.
Au delà elle passe entre ...

Il a également été convenu que nous laisserions et délaisserions à notre sœur la margravine Adelheit les biens suivants en tant qu'héritage, que nous conserverions jusqu'à ce qu'elle ait prêté serment et prenne possession de son héritage, dans un délai de quatre mois"traduit très librement" (K. Scharrer).
Voici en quoi consistent ces biens : les censes de la halle de Belfort, les fiefs héréditaires et les localités mineuressi Klaffer est une faute d'orthographe, pour Kaff(er) qui se trouvent dans cette part, item la moitié des revenus du sceau du tabellionné de Belfort, ainsi que l'avoine [sic] des biens de Me. Guillaume dans le faubourg supérieur, item les revenus et le droit que notre susdite mère à sur le moulin de BourogneBolle, item ce que notre susdite mère avait acquis du sire de Hettwiller à Sommerkhilche et à Traubach, item la mairie de Pérouse que notre mère y tient du comté de Montbéliard, de Pérouse, Dorans et Bessoncourt, Meiginhanat, Eguenigue, MenoncourtMimingen possiblement pour Müningen, RottwillerRougegoutte ? et Vétrigne, item l'étang de Belfort, item Offemont du Val et le village de BucBirr avec la chênaie et les revenus y afférents. Item la moitié du bien gagé de Cosonal à Suarce Schwerzinger, qui vaut 140 livres de pfennig.
Il a également été convenu que chaque partie devait utiliser sa part d'héritage comme elle l'entendait, indépendamment de tout autre accord. Chaque partie peut aménager ce qu'elle veut et utiliser sa propriété comme elle l'entend, avec la seule réserve qu'une partie ne peut pas faire pour elle-même un aménagement qui limiterait d'une manière ou d'une autre les revenus de l'autre partie,
item la moitié des forêts de Auxelles, d´Affemet ...

Item la collation des prébendes des chanoines et de l'église paroissialepour lut = les gens, la communauté, d'où "église paroissiale" reste indivise entre nous Ursule et notre sœur Adelheit. Si l'une d'entre nous utilise son droit, l'autre pourra ensuite en faire autant. Adelheit commencera par attribuer les premières prébendes qui deviendront vacantes.
Voici les fiefs qui nous reviennent dans cette part (6) : Henry, fils de feu le sire de Beurngorn, Didier de Montreux, messire Henry de Grandvillars, messire Renaud d'Abbanscf. Histoire généalogique des sires de Salins, par J. B. Guillaume, 1757. Renaud aurait hérité de la seigneurie de Novillard., Jean Mengelle de VendlincourtWendelstorff, messire Henemann von Roppach, Peter von Troscholtingen, Renaud, fils de feu le sire de Delle, le fils d'Exteis, Hugelin von Rinecke, Bullin, héritier de Belle, le sire Gyat, héritier de Plancher, le Gutmann de Hatstatt, le Cordolier de Granges, le sire de Pranges, messire Andres d'Ungerstein ; et des droits partagés avec les baillis des prévôtés ; les deux fils de feu messire Guillaume de Gliers (7), et Jean, fils de feu messire Guillaume de Montreux nous doivent également des redevances.
Item appartiennent encore à cette part les biens décrits ci-après, qui sont établis hors de la ville de Belfort (6) : le fils de Vuillemat Biou, Joseph Poschmat, le fils de Perrenat Angnel, le fils de Rulin Bunenat, Hugelin, fils de Gerhard Scherer, Peter son beau-frère, Étienne (autre) fils de Gerhard Scherer, Bayumb Heinrich, et les héritiers Scherer.
La part d'Ursule, en biens propres, semble relativement restreinte, mais il est difficile d'apprécier la valeur et le rapport d'un bien.
Une question reste cependant sans réponse :
La part d'Adélaïde est-elle entièrement décrite dans ce texte, ce qui expliquerait l'absence de la lettre de partage la concernant ?
La lettre de partage échue à Marguerite a été conservée dans les archives de la principauté de Bade, puis du land de Baden-Württemberg. Sur le site de cette institution, nous trouvons la référence à la version française de ce document :
A 3 Bü 1, 2, August 26 Teilungsvertrag der Herzogin Johanna von Österreich, der Gräfin Ursula von Pfirt und der Markgräfin Adelheid von Baden über die Verlassenschaft ihrer Mutter, Gräfin Johanna von Mömpelgard (Übersetzung) : [Accord de partage entre la duchesse Jeanne d'Autriche, la comtesse Ursula von Pfirt et la margravine Adélaïde de Bade concernant la succession de leur mère, la comtesse Jeanne de Mömpelgard (traduction)] ; Sprache : Französisch.
Mais, par ailleurs, ce service a eu la grande amabilité de réaliser à notre demande, et à nous transmettre gracieusement, une version numérique du document coté HStA A 266 P 246, qui est l'original de cette lettre de partage ; il est visible ici.
Concentrons nous sur la partie spécifique du texte concernant la margrafin Marguerite / Grede.

Und wart uns die vorgen(ante) Greden margrafin ze unsere teil das hie nach geschriben stat. Das ist zewissende Hericort mit der Schestelenie //
als es von alten har komme ist, ane dz dorf dz da heiset But und ane dz eichen holtz des derbi stet, dz da geteile ist zu dem ob’ teil gegen Beffort. Item
wart uns och ze disem teil alles das mitenander das von Stobont harwid’ genal- //
len ist. Item der walt der da heiset die Wen’ von Argesans, darzu die welde Perosel, Bessilles, Malefosse, Charmeil und alle andere welde die zu der vorgenante Schestelenie gehören. Die sint die lehen welschen Rotemberg, Eschers, herr Johannes von //
Waites, herr Friderich von Chastaillon, hu herr’in erben von Champels, die tochter von Flagey, des von Bellewilre leben, Ludowig von Cuvé, herr Gerhart
von Weites, herr Peter von Forschans, herr Wilhelm von Nans und di kint von Schwertze //
und die vogeteie von der probestei von Sant Walpert. (...)
Ce qui est écrit ci-dessous est notre part, celle de la marquise Grede.
Héricourt avec la châtellenie telle qu'elle a existé de tout temps, sans le village de Buc et sans la forêt de chênes qui s'y trouve, la partie supérieure jouxtant la seigneurie de Belfort. Nous avons également reçu tout ce qui provient de la seigneurie d'Étobon. Item la forêt dite la Vaivre d'Argiésans, plus les forêts de la Perchelle, Bessilles, Malefosse, la Charmée et toutes les autres forêts qui font partie de la châtellenie. Et encore les fiefs du Rougemont "français" (16), d'Essert, ceux du sieur Johannes von Waites, du sieur Frédéric de Chastaillon, des héritiers de la dame de Champey, de la/ des fille(s) de Flagey, le fief de Belleville, ceux de Louis de Cuve, du sieur Gerhart von Weites, du sieur Pierre de Forschans, du sieur Guillaume de Nans et des enfants de Suarce, ainsi que le bailliage de l'abbaye de Saint-Valbert.
Ce descriptif est relativement court, mais les fiefs désignés représentent un territoire vaste, bien que morcelé.
La partie principale en est la seigneurie d'Héricourt, même si son étendue exacte à l'époque est incertaine. Marguerite s'intitulera d'ailleurs "dame d'Héricourt".
La seigneurie d'Étobon, provenant comme toutes les précédentes de la succession de Montbéliard, a été disputée entre les divers héritiers (beaux-frères de Jeanne de Montbéliard), et il semble que Marguerite ne l'ait pas conservée longtemps (13).
Les fiefs pour lesquelles Marguerite est désignée comme suzeraine sont ici encore difficiles à identifier ; on retrouve Waites désignant des familles, alors que, dans la part de Jeanne, le même nom désignait deux toponymes que nous avons traduit par Evette. Mais nous n'avons pas trouvé trace d'une famille noble d'Evette.
Plusieurs de ces fiefs semblent situés dans le comté de Bourgogne (16).

On a tenté de représenter ci-contre une synthèse des informations géographiques relevées dans les 3 lettres de partage.
Cette carte n'inclut pas les parts advenues à Jeanne et Ursule par la succession paternelle (Rougemont, Florimont, ...).
On a distingué, en couleurs fortes, les biens en pleine propriété, et, dans une teinte plus claire (suzerainetés), ceux qui sont tenus par des vassaux : dans les lettres, il sont précédés par le terme "die lehen von" (les fiefs de) et figurés ici quand ils ont pu être reconnus.
Cette représentation est purement indicative. Elle ne tient compte ni de l'évolution des emprises territoriales, ni des nombreux biens ou fiefs que nous ne sommes pas parvenus à déterminer.
Les villages de Valdoie et Cravanche, par exemple, ont probablement été attribués à l'une des sœurs, mais ils ne sont pas reconnaissables dans les descriptions de fiefs.
Les biens du sieur de Roppe sont connus pour être répartis sur plusieurs territoires. Pour simplifier, nous les avons localisés dans le village éponyme.
Concernant la part de Marguerite, nous n'avons pas fait figurer la seigneurie d'Étobon, dont le statut n'est pas clair.
Il faut garder à l'esprit que ces lettres traduisent seulement un premier partage entre les filles de Jeanne.
D'autres accords entre les héritiers ont suivi et conduit à de nombreuses modifications de cette première répartition. Et, on le sait, quelques décennies plus tard, l'essentiel de ces biens et suzerainetés ont fini dans l'escarcelle des ducs de Habsbourg (hormis Héricourt).
Nous souhaitons, dans des articles ultérieurs, nous pencher :
- sur la succession d'Ulrich de Ferrette (1324), et particulièrement sur les fiefs de l'espace belfortain,
- sur le sort du fief principal de cet espace : la ville et le château de Belfort, ici partagés entre Ursule de Ferrette et Adélaïde de Bade.
Oye : village disparu près de Bermont,
Löbe : Éloie, d'après Pajot
Forseloneschert : Forchelon-Essert, village disparu de la mairie de Rougegoutte, apparaissant dans le terrier de Catherine de Bourgogne en 1415, sous la forme Fecelenonxert ou Felennasser.
"Conformément à l'ancien usage et sur l'ordre de feu Ulrich zu Pfirt, nous avons décidé que le duc susmentionné Albrecht et son épouse donneraient à notre fille Ursula 2000 marks en argent au poids de Bâle et qu'elle les accepterait."
La dévolution des biens au couple Jeanne x Albert de Habsbourg aurait ainsi été décidée par feu le comte Ulrich. Son testament, du 9 mars 1324, est, semble-t-il, conservé aux archives de l'état slovène, à Ljubljiana.
Il est transcrit par Steyerer ici.
On constate qu'il ne contient aucune disposition sur l'attribution, contre compensation financière, du fief de Ferrette à leur fille Jeanne et à son futur époux.
Le chapitre concernant Evette confirme notre traduction Weites = Evette
Les droits sur la seigneurie d'Étobon auraient été rachetés en 1363 par Henry de Montfaucon, comte de Montbéliard, oncle par alliance de Marguerite.
Il ne fait pas de doute qu'Ulrich de Ferrette possédait l'intégralité des droits sur la seigneurie de Rougemont-le-Château. Un des accords passés entre sa veuve Jeanne et Albert II le jour du mariage de celui-ci avec Jeanne de Ferrette mentionne explicitement que cette seigneurie serait remise à ce dernier :
"Nous donnons également, en toute légitimité, à nos héritiers susmentionnés la seigneurie de Rougemont et la ville, ainsi que tous les biens qui y sont rattachés, et qui nous sont échus. Après notre mort, ces biens reviendront entièrement et sans réserve à notre fils, le duc Albrecht, et à Johanna, son épouse, notre fille" (Herrgott, charte 747, 17 mars 1324).
Cette seigneurie était de toutes manières destinée à être partagée entre Jeanne et Ursule. Même si cette dernière et son mari parvinrent ultérieurement a obtenir une meilleure compensation à la renonciation à leur part de la succession Ferrette, ils confirmèrent définitivement cette renonciation en 1350, un an après le décès de Jeanne de Montbéliard, qui l'avait conservée comme douaire.
Nous pensons donc qu'ici, le welschen Rotemberg n'est pas Rougemont-le-Château (l'adjectif welschen étant précisément destiné à l'en différencier), mais plutôt Rougemont en Comté (25505).
Une famille noble éponyme détenait ce fief ; en 1311, (cartulaire de Neufchâtel), Humbert de Rougemont donne à Ulrich III et reprend en fief le village et la roche de Saulx (70478) ; il pourrait s'agir ici de cette suzeraineté, mais le problème est le même que pour Rougemont-le-Château : elle appartenait aux Ferrette, et ne devrait pas se trouver dans la succession de Jeanne.
La seule possibilité subsistante est que les comtes de Montbéliard possédaient des biens, ou une part de suzeraineté à Rougemont "français". Ce seraient ces droits qui firent partie du lot advenu à Marguerite. Notons d'ailleurs une cohérence géographique : ils sont situés en Comté, comme la seigneurie d'Héricourt (et sans doute d'autres fiefs, comme ceux des sieurs et dames de Champey, Flagey, Cuve, Forschans, Nans...)