Affermage d'un droit de tabellionnage
Par LISA
Archive : AD90 2E1_116

Un acte du tabellionné de Belfort en 1701 nous éclaire sur un cas qui, dans notre secteur, revêt une certaine importance : l'attribution d'une charge de tabellion dans une seigneurie voisine, mais dépendant du même seigneur : la baronnie d'Altkirch.

Les seigneurs hauts-justiciers ont le droit de tabellionnage (ou tabellionné) ; c'est à dire qu'ils ont le droit de nommer des notaires seigneuriaux (ou tabellions) qui n'exerceront que dans le ressort de la justice seigneuriale. Le droit de tabellion consiste à la rédaction (rétribuée) de tous les contrats ; il s'accompagne le plus souvent de celle des greffes de la seigneurie, qui consistent à la rédaction des actes de justice.

Plutôt que d'engager un tabellion, un greffier ou un notaire qu'il aurait à rétribuer, ou avec lesquels il aurait à partager les revenus, le seigneur préfère affermer ses droits. C'est d'ailleurs le principe appliqué à l'essentiel des revenus seigneuriaux, quels que soient leurs natures.

Ainsi, le seigneur percevra une somme fixée à l'avance, inférieure à celle qu'il pourrait espérer, mais il évitera toute gestion et tout gonflement de son personnel.


En 1701, le fermage du tabellionnage d'Altkirch, exercé par le sr. Neff, arrive à échéance. Il passe à Me Henry Mougeot et l'acte décrit le détail du contrat d'amodiation (2E1_116) :

C'est un employé du duc, M. François de Laffillé, intendant des affaires du duc en Alsace qui passe ce contrat ; mais c'est le duc lui-même qui le ratifiera, dans un document non conservé dans l'archive que nous avons en main (mais recopié en marge).

  • La ferme durera 6 ans et 8 mois ; son prix sera de 600 livres par an.

  • Le preneur "sera tenu de suivre et observer les Règlements et Ordonnances de sa Majesté et faire en sorte qu'il n'en soit fait aucune plainte". N'oublions pas en effet que, si la charge est seigneuriale, le tabellion est un officier public, qui applique les ordonnances royales, à l'intérieur de sa circonscription.

  • Le titulaire de la charge sera lui-même amené à engager un employé qui effectuera le travail d'écriture. Voici rappelée la consistance de ce travail :

  • A la fin de son bail, il devra transmettre ses registres à son successeur.
  • S'ensuit un point important : la stabilité du prix du fermage :

Le revenu de cette ferme ne doit pas dépendre des circonstances de l'exercice de la charge ; le prix de la ferme demeurera inchangé "pour l'établissement de notaires royaux" (les notaires royaux n'ont pas de limite dans leur juridiction d'exercice) "de stérilité" (?) "guerres, pestes et famines" (autant de circonstances diminuant les revenus du preneur).
Toutefois, il y a une circonstance de sauvegarde pour le tabellion "... à moins qu'il n'y eut cessation de justice et abandon des 2 tiers de la ville".

  • Le bail ne devra pas être cédé sans consentement du seigneur.
  • Un logement est accordé au preneur dans le château d'Altkirch, à charge de menues réparations.

Voici à présent la copie de la ratification du duc :

Nous Duc de la Meilleraye, pair de France, Comte de Ferrette, Belfort, Delle et Thann, baron d'Altkirch, Isenheim et autres lieux, Gouverneur pour le Roy de la ville et forteresse du Port-Louis [Morbihan] Hennebont et Quimperlé, province de Bretagne, après avoir lu le présent bail ci contre et des autres parts fait au sieur Mougeot de Nos Greffes et Tabellionné de Notre Baronnie d'Altkirch avons icelluy approuvé et ratifié, consentons qu'il porte son plein et entier effet. Fait en notre hotel à Paris le dixième d'avril mil sept cent un.

Signé en l'original :

Paul Jules Mazarin

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