SAS l'archiduc Léopold séjourne à Belfort : AMB BB2
par LISAVoir aussi l'article Léopold de Habsbourg, régent d'Autriche antérieure.
Le 15 août 1624, le registre du Conseil des bourgeois de Belfort porte le compte-rendu suivant :
En voici la transcription :
(texte brut) | (texte interprété) |
La commune a esté mandez et luy a esté remonstré qu'estant assurez de la venue de son A. Sme. l'archeduc Leopold d'Austriche notre souverain Prince et Seigneur, en ceste ville, il estoit neccessaire de se demonstrer, à son arrivez et durant son seiour, ainsi qu'il appartenoit à bons et fidelles subiect envers son Prince souverain, et partant, qu'on leurs ordonnoit et à ung chascung particulier de des maintenant tenir les rues de la ville nette et mondé, ensemble de leurs logis Item de tenir ses armes prestes et nettes à fin qu'estant mandez pour sen servir, soit à son entré ou es portes et aultres lieux neccessaire, tiercement que les maitres des tours et estably de visiter leur-dicts estably, les tenir nettes, et ordonner ce que sera neccessaire pour tirer, de pourquoi leurs sera fourni poultre et plomb, quartement qu'ung chascung se démonstre modeste réverend et respectueulx, tant envers sadicte Altesse que les seigneurs et aultres serviteurs de cour ... signamment estant logez en leurs maisons, et finalement de soy si bien comporter que sadicte Altesse ni aultres, voire (?) messieurs du conseil n'en ayent aulcunes mescontantement le tout à point d'estre chastié et punis. |
La commune a été convoquée et il leur a été |
Les personnes :
- Léopold d'Autriche est Léopold V de Habsbourg (1586-1631),
comte de Tyrol, qui a en charge l'administration des Pays Antérieurs
(dont d'Alsace). Il est fils du duc Charles II de Styrie et le frère
cadet de l'empereur Ferdinand II (1578-1637), qui a recueilli en 1619 la totalité
des titres de la famille (entre autres, l'archiduché d'Autriche et
le landgraviat de Haute-Alsace), à l'exception du Tyrol qu'il a laissé
à Léopold (cf. Léopold
de Habsbourg, régent d'Autriche Antérieure).
Celui-ci fut d'abord évèque de Strasbourg (1608-1626) puis, renonçant aux dignités ecclésiastiques, épousa Claudia de Médicis et exerça les pouvoirs concédés par son frère empereur.
Après son décès, sa veuve le remplacera et sera le dernier souverain autrichien de Belfort, jusqu'à sa prise par les troupes françaises en 1636. - Le maître-bourgeois de Belfort, qui préside le Conseil de la ville, est pour l'année 1624 Jean Noblot (ou Noblat) le vieux, membre de cette ancienne famille belfortaine, dont l'ascension sociale culminera avec François et François Bernardin, subdélégués à la fin du 18ème siècle.
Les événements :
Depuis 1619, la région n'est pas épargnée par les troubles
et l'instabilité dûs à la guerre de 30 ans ; néanmoins
la guerre ne débutera vraiment à Belfort qu'en 1632 avec l'arrivée
des suédois ; elle durera jusqu'en 1640, avec en 1636 l'épisode
de la prise définitive de Belfort au nom du roi de France par le comte
de la Suze.
En 1624, on est donc au début d'une période de crise : difficultés
économiques, appels à contributions du souverain autrichien qui
commence à s'inquièter pour l'avenir de ses états, mais
la vie est encore presque normale.
L'annonce de l'arrivée de l'archiduc est alors, on l'imagine, plutôt
une bonne nouvelle.
Suite :
La visite de "son altesse" à Belfort transparait dans un autre
acte du même registre, portant sur une question de règlement forestier
:
Le 27 septembre 1624 Monsieur Cristoff Aichorn et le forestier du Vaidoye ont remonstré à Messieurs que son A. Sme. l'archeduc Leopold a son derrier depars de ce lieu avoit ordonne de mettre certain Canton de bois en Arsot pour entretenir le sauvagins (?), ce qu'il avoit faict, et pource choisi ung certain canton appellé le mont d'Arsot, dequoy ilz avoient voulu advertir messieurs par le commandement de messieurs les officiers à fin de ny point envoyer la porcherie de la ville attendu l'ordonnance de sad. A. portoit confiscation de ceulx qu'on y meneroit et garderoit # Messieurs leurs ont respondu qu'ilz avoient la droiture et privilege de conduire le menuz nourrins par tout lesd. bois darsot pour jouyre du pesnage, mais quilz ne voudroient aulcunement offencer ny empescher sad. A. de son plaisir de la chasse, partant feront abstenir leurs berger de hanter led. canton soulz esperance que ce ne sera que pour la pnte anné et que sad. A. entretiendra la ville en ses anciennes coustumes et droitures, et que si par cas fortuit il y eschappoit quelque menuz nourrins aud. canton, on ne leurs porterait point de dommage. |
Le 27 septembre 1624 M. Cristoff Aichorn et le forestier du Valdoie ont déclaré à Messieurs que SAS l'archiduc Léopold, lors de son précédent départ de ce lieu avait ordonné de laisser un canton du bois d'Arsot en réserve pour la préservation du gibier, ce qu'il avait fait et pour cela, il avait choisi un canton appelé "le mont d'Arsot" de quoi ils avaient voulu avertir Messieurs, par commandement à MM. les officiers, de ne pas y envoyer paître les porcs de la ville ; l'ordonnance de son Altesse comportait en effet la confiscation des animaux qu'on y mènerait et garderait. Messieurs leur ont répondu qu'ils avaient le droit et le privilège de conduire les jeunes porcs dans tout ledit bois d'Arsot pour y jouir du glandage, mais qu'ils ne voudraient aucunement offenser son Altesse ni le priver de son plaisir de la chasse ; ils interdiront donc à leurs bergers de fréquenter ledit canton, en espérant que celà ne portera que sur l'année présente et que son Altesse préservera les anciennes coutûmes et droits de la ville, et que si, par hasard, quelques porcelets s'échappaient et se retrouvait dans ledit canton, ils n'en subiraient pas de préjudices. |
Cet acte confirme le (ou les) séjour(s) de l'archiduc
Léopold à Belfort dans les années 1620.
Le bois d'Arsot (ou d'Arseau) est situé au nord de Belfort, à
l'est de Valdoie :
Malheureusement, l'ambiance se dégrade brutalement à la fin de
l'année : le 22 décembre, il n'est plus question de fête:
La commune a esté assemblée, sur rescrition et mandement de S. A. Sme. l'archeduc Leopold d'Autriche notre souverain Prince et Seigneur, concernant les troubles de Guerres que présentement de nouveau se demonstrent tant au St. Empire que ès pays circonvoisins, dont il y avait crainte que ses avant-peys ne fussent encore molesté et ravagé avant que la contre défense de sesdits ne fût preste et sur pied et a esté remonstré et ordonné à ladite commune que chascung bourgeois et habitant soit dehuement fourni et prest de ses armes que lui sont estez imposez, mesme de toutes munition de guerre neccessaire, et aussi les muscataires de deulx ou trois libvres de pouldres et de plomb et mèche à l'équivalent, et les hoggues seles, ce et au respect (?) des musquets, et en second lieu que chascung se fournisse de provision de victuailles et graines, pour le moins pour ung demy an, mesme entant que les villageois et aultres sur le pays vuille retirer et refuyr (?) quelques graines et victuailles en ceste ville, que ceux auprès lesquels ils s'addresseront ne les ayent à refuser, ains à recepvoir en seurté |
La communauté a été rassemblée, sur réponse écrite et commandement de SAS l'archiduc Léopold d'Autriche notre souverain prince et seigneur, concernant les troubles de guerre qui se présentement de nouveau se font jour, tant au St. Empire que dans les pays voisins, dont on peut craindre que ses avant-pays [l'Autriche Antérieure] ne fussent encore dévastés et ravagés, avant que leur défense ne fût prête et organisée. Il a exposé et ordonné à cette ville que chaque bourgeois et habitant soit dûment équipé des armes qui lui ont été imposées, ainsi que de toutes munitions de guerre nécessaires. De même les mousquetaires de deux ou trois livres de poudre et de plomb, et de mèches en suffisance, et les "hoggues" (2) sellées (?) à l'instar (?) des mousquets. Et en second lieu que chacun s'approvisionne en graines et vivres pour au moins une demi-année. De même si les villageois et autres habitants du pays veulent recourir à quelques graines et vivres dans cette ville, qu'on ne les leur refuse pas, mais qu'on les reçoive en confiance. |